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Commentaire RB 2, 37-40

25 juin 2024.

37 L’abbé doit le savoir : celui qui a reçu la charge de conduire des personnes doit se préparer à en rendre compte.

38 Il peut être responsable de beaucoup de frères ou de peu. En tout cas, c’est certain et il doit le savoir : au jour du jugement, il rendra compte de tous ses frères au Seigneur, et de lui-même aussi, bien sûr !

39 C’est pourquoi, lui, le berger, il craindra toujours l’examen qu’il passera un jour au sujet des brebis que Dieu lui a confiées. Ainsi, en faisant attention aux comptes qu’il va rendre pour les autres, il devient attentif aux comptes qu’il va rendre pour lui-même.

40 En aidant les autres à se corriger par ses remarques, l’abbé lui-même est amené à se corriger de ses défauts.

En ces lignes, Benoit rappelle pour la cinquième fois à l’abbé qu’il devra rendre compte de sa conduite et de la croissance de ceux qui sont confiés à sa vigilance (RB 2,6,14,34,38,39).

En ces lignes, nous avons une sorte de concentré sur la personne de l’Abbé pasteur et l’affirmation d’une conviction enracinée dans les Écritures que nous sommes tous responsables les uns des autres.

Ézéchiel disait : « Toi aussi fils d’homme, je t’ai fait sentinelle pour la maison d’Israël. Lorsque tu entendras une parole de ma bouche, tu les avertiras de ma part …. Si tu ne parles pas pour avertir le méchant d’abandonner sa conduite, c’est lui le méchant qui mourra dans son péché, mais c’est à toi que je demanderai compte de son sang … » (Ez 33,7-9)

Jésus, le Fils de l’homme a été par excellence « sentinelle » pour notre humanité, par sa parole d’autorité, de justice et de vérité. Il a été une sentinelle fragile puisqu’ayant parlé en vérité, il en est mort. Mais la vérité qu’il a proclamée n’en ressort que plus grande.

A sa suite, membres les uns des autres en Jésus, nous sommes des sentinelles, les uns vis à vis des autres. Dans le monastère, l’abbé est sentinelle à un titre spécial, pour aider, reprendre, interroger et interpeller. Mais chacun des frères à sa place est aussi sentinelle pour ses frères.

Parfois un frère peut venir voir son Abbé et lui dire : « un tel a fait ceci ou cela », il faudrait faire quelque chose. Sous-entendu, toi le Supérieur, fais quelque chose… Mais, n’ayant rien vu, seulement entendu ce qui est rapporté, est-il toujours le mieux placé pour dire quelque chose ? Peut-être oui, mais pas toujours … Dans l’évangile, Jésus nous dit : « Si ton frère vient à pécher, va le trouver et reprends-le seul à seul » (Mt 18,15).

Parfois, les frères n’osent pas « aller trouver seul à seul un frère » pour lui dire ce qui ne va pas… Il faudrait pourtant que, dans nos monastères, nos paroisses, nos familles… nous découvrions cette qualité de vie fraternelle où l’on arrête de parler du frère dans son dos, pour lui parler en face. Je le reconnais, ce n’est pas toujours facile. Cette démarche requiert du courage, mais aussi de l’amour que l’on puisera dans la prière.

Il ne s’agit pas d’invectiver en disant : « tu as fait cela, tu es comme cela », mais plutôt de dire : « j’ai vu cela, j’ai entendu cela, et cela m’a choqué, et m’a semblé injuste ». Non pas parler en « tu » mais en « je ».

De cette manière, je me situe en frère devant un autre frère, dans une même responsabilité vis-à-vis de notre vie commune qui demande une vigilance constante. Je ne me situe pas en juge… Si le frère réagit mal à cause de sa susceptibilité blessée, c’est son problème. J’ai dit ce qui me semblait devoir être dit. Si Jésus la Sentinelle de l’humanité est mort, ne pouvons-nous pas supporter les égratignures de réactions un peu vives ?