15 février 2025.
Commentaire RB 68, 1-3
1 Voici ce qui peut arriver : on commande à un frère des choses difficiles ou impossibles. Il acceptera l’ordre donné avec grande douceur et en désirant obéir.
2 S’il voit que le poids de la charge dépasse tout à fait la mesure de ses forces, il dira à son supérieur pourquoi il ne peut pas le faire. Il présentera ses raisons avec patience et au bon moment,
3 sans se montrer orgueilleux, sans résister, sans s’opposer.
Le chapitre commence par cette expression « Voici ce qui peut arriver » …
Benoît, dans ces derniers chapitres de la Règle, nous livre sa propre expérience. Il arrive donc que l’Abbé demande à un frère quelque chose d’impossible et cela est même arrivé à saint Benoît puisqu’il en a fait l’expérience.
Quelle est alors l’attitude juste que préconise Benoît ?
Tout d’abord, accepter ce qui m’est demandé, même si cela est difficile (voire impossible à mes yeux) et Benoît invite ici à deux sentiments spirituels : une grande douceur et un désir d’obéir. La douceur dont parle Benoît est un sentiment qui se situe au fond du cœur et qui s’oppose à la violence et à la colère ; le désir d’obéir est ce qui permet de me dépasser, de ne pas m’enfermer et ne pas me replier sur moi-même sur mes peurs ou mes incapacités.
Ensuite, Benoît continue et évoque le cas où un frère après avoir reçu la mission de l’abbé s’aperçoit que cela dépasse la mesure de ses forces… Il devra aller voir son supérieur et lui expliquer ce que cela produit en lui. Ici encore Benoît précise deux choses : la patience, c’est-à-dire ne pas exiger que le supérieur cède et change d’avis, être libre jusqu’au bout c’est-à-dire obéissant jusqu’au bout ; ensuite choisir le bon moment car l’abbé n’est qu’un homme et qu’une chose importante comme cela suppose que l’on attende le bon moment.
Le dernier mot revient à l’abbé dit Benoît ; si l’abbé maintient son ordre, il donne la clef spirituelle au frère : « Il est bon pour lui de faire la chose qu’on lui ordonne ». Benoît ne dit pas que l’abbé a forcément raison, mais qu’il est bon pour le frère d’obéir.
Ce chapitre s’adresse plus au frère qu’à l’abbé ; Benoît invite le moine à parler plutôt qu’à murmurer sans jamais pour autant perdre de vue que l’obéissance monastique n’est pas un simple échange d’idées.
L’abbé de son côté doit se dire que s’il y a ce chapitre dans la Règle, il est important qu’il écoute les frères dans les décisions qu’il prend et qu’il ne perd jamais sa dignité lorsqu’il change d’avis, au contraire. Il doit cependant aussi avoir parfois le courage de s’opposer à ses frères lorsqu’il perçoit l’enjeu spirituel et communautaire de la décision à prendre ou encore, lorsqu’il veut aider un frère qui a peur à prendre sa mesure et à grandir.
Commentaire RB 4, 59-60