13 février 2025.
Jeudi de la 5ème Semaine du Temps Ordinaire
Mc 7, 24-30
Les miettes d’une femme syro-phénicienne
D’une méditation du père François Bessonnet
Dans ce dialogue, Jésus met en avant la séparation entre Israël (les enfants qui prennent part au repas) et les nations (les chiots situés loin de la table). Le pain de l’Évangile du règne de Dieu est destiné à Israël, aux purs suivant la Loi, et pas à être gaspillé, jeté dehors à de vulgaires chiens errants. Les païens ont leurs propres divinités pour chasser leurs propres démons. Jésus renvoie donc la femme à son monde, ses cultes et ses guérisseurs… Cependant, il n’oppose pas les purs d’Israël aux chiens de païens. Les termes employés, enfants et chiots, montrent déjà une convergence : l’un et l’autre diffèrent mais, tous deux ont besoin de grandir, de mûrir… de se convertir. Enfants d’Israël et chiots des nations sont décrits en termes d’attente.
Or cette femme va justement, ici, témoigner de la maturité de sa foi en Jésus. Elle ne répète pas une demande éplorée pour sa fille, mais se place dans la logique du règne. Elle est d’abord la première, de tout l’évangile de Marc, à l’appeler Seigneur (kurios/κύριος), un terme désignant le plus souvent Dieu chez Marc. Ensuite, elle donne entièrement raison à Jésus. Elle acquiesce à sa Parole. À cette table, par sa naissance, elle n’a (logiquement) pas sa place. Les enfants d’Israël sont les destinataires du pain du Seigneur. Ce faisant, à travers son désir de manger les miettes du repas, elle reconnaît le Dieu d’Israël comme rédempteur.
Ainsi, elle réinterprète la parole de Jésus, en plaçant les chiots sous la table. Elle ne se situe plus hors de la maison ou loin de la table. Elle s’immisce dans ce repas, comme la femme hémorroïsse venait dans la foule, par derrière. Inutile donc de jeter le pain, elle recevra sa part, ces miettes de la surabondance que les enfants ont laissé tomber. Et voilà sa vraie foi : prendre part au repas de son Seigneur et en faire vivre son enfant.