17 juin 2024.
L’Évangile de ce jour est la suite du discours de Jésus que nous avons entendu la semaine dernière (Mt 5,17-37). On y retrouve les mêmes refrains « Vous avez appris… Eh bien ! moi je vous dis… ».
Jésus ne lit pas la Loi dans une rigidité plus stricte que les pharisiens ni dans une interprétation souple ou affadie. Il révèle et éclaire ce qui en est en la substance vitale : une parole d’Alliance en vue du bien de tous, selon la volonté du Père. Pour ces deux dernières antithèses, Jésus reprend la loi du Talion (œil pour œil, dent pour dent !) et l’amour du prochain, dans la logique du Royaume.
Dans la Bible, la loi du Talion est mentionnée à plusieurs endroits…
- En Exode pour les dégâts collatéraux d’une bagarre :
Ex 21 22 Si des hommes, en se battant, bousculent une femme enceinte et que celle-ci avorte mais sans autre accident, le coupable paiera l’indemnité imposée par le maître de la femme, il paiera selon la décision des arbitres. 23 Mais s’il y a accident, tu donneras vie pour vie, 24 œil pour œil, dent pour dent, pied pour pied, 25 brûlure pour brûlure, meurtrissure pour meurtrissure, plaie pour plaie.
- En Lévitique pour un dommage grave bien qu’accidentel :
Lv 24 19 Si un homme blesse un compatriote, comme il a fait on lui fera : 20 fracture pour fracture, œil pour œil, dent pour dent. Tel le dommage que l’on inflige à un homme,
- Et en Deutéronome pour le cas d’un faux témoignage :
Dt 19 16 Si un témoin injuste se lève contre un homme pour l’accuser de rébellion, 17 les deux hommes qui ont ainsi procès devant le Seigneur comparaîtront devant les prêtres et les juges alors en fonctions. 18 Les juges feront une bonne enquête, et, s’il appert que c’est un témoin mensonger, qui a accusé son frère en mentant, 19 vous le traiterez comme il méditait de traiter son frère. Tu feras disparaître le mal du milieu de toi. 20 Les autres, en l’apprenant, seront saisis de crainte, et cesseront de commettre un tel mal au milieu de toi. 21 Ton œil sera sans pitié. Vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied.
Ces contextes sont très différents et l’on ne sait pas s’ils furent appliqués à la lettre… ou dans l’esprit. La loi du Talion, pour terrible qu’elle nous apparaisse, est pourtant une loi qui vise une justice équitable en mettant fin au recours à la vengeance et en mettant tout homme sur un pied d’égalité devant la Loi, quel que soit son rang social ou ses revenus.
Un œil est un œil, qu’il soit pauvre ou riche et nul n’a plus besoin d’arracher un bras en vengeance d’une main coupée pour avoir arraché un ongle…
La parole de Jésus en Matthieu reprend donc ces fondamentaux de la loi du Talion. Le principe de non-violence vient affirmer ce refus d’entrer dans une logique de vengeance. Cette dernière ne correspond pas à l’ordre du Royaume des cieux. Au contraire, Jésus invite à répondre à la violence par un acte pacifiant et bien plus signifiant, voire des plus subversifs à l’ordre mondain.
Ainsi le refus absolu de la vengeance s’exprime de manière imagée par cette demande de tendre l’autre joue après une gifle injurieuse. C’est-à-dire à répondre au mal par le bien, à donner ce qu’il y a de plus précieux comme son propre manteau. Il ne s’agit pas de ne rien faire ou de laisser faire, mais d’agir pour exprimer, face au mal, le bien, cette bonté qui vient de Dieu.
Bien plus, ici l’évocation de la gifle, du manteau puis du procès nous renvoie à la Passion même de Jésus qui manifestera au monde la force bienfaitrice de Dieu contre le Mal et la haine. La dernière évocation de la Loi par Jésus poursuit cette idée : à l’amour du prochain et à la haine de l’ennemi se substituent l’amour des ennemis.
30 septembre