3 juillet 2024
11 Mener durement ton corps.
Les écrits monastiques nous rapportent des récits de prouesses ascétiques, mais ils veillent aussi à nous rapporter les histoires de tel ou tel qui n’a pas fait preuve de discernement dans ses pratiques corporelles et qui est tombé dans la démesure, fatale à son équilibre physique et psychique.
A notre différence, des anciens vivaient cette conviction forte qu’en travaillant sur le corps, on pouvait sûrement agir sur l’âme. D’où leur attention particulière pour l’ascèse touchant la nourriture, le sommeil, la parole.
Leur but n’est pas de tuer le corps, mais de le travailler pour libérer l’âme de ses passions qui s’expriment dans et par des mouvements corporels. Évagre a une pensée qui est assez significative de cette recherche : « Qui réduit en servitude ses chairs sera sans passion, qui les nourrit souffrira en elles des douleurs » (Aux moines, 6).
Mener durement ton corps. Comment entendre cet instrument aujourd’hui ? Certainement tout d’abord, en trouvant un autre mot à la place de Mener durement : « discipliner ou exercer ? ». Ensuite en essayant de mieux comprendre le lien entre notre cœur, notre âme et notre corps. Nous savons mieux aujourd’hui que les troubles ou les dérèglements éprouvés dans notre corps, ont leur source en bonne part dans notre histoire et dans des difficultés relationnelles vécues lors de notre petite enfance, le plus souvent à notre insu. Des mouvements, des pulsions mal orientées nous traversent sans que l’on en comprenne toujours bien la cause et ils nous encombrent, ou nous pèsent.
Si notre corps a besoin d’être discipliné pour ne pas nous entrainer dans la déchéance qui peut venir vite, il nous envoie un signal fort. En nous une blessure est là qui appelle un chemin de guérison du cœur, de l’âme, du désir. Et, plus que les anciens, nous savons l’importance de la parole, de la relation renouvelée sur ce chemin de guérison.
Nous dirions donc plus volontiers : « discipliner notre vie corporelle et libérer la parole ».
11 octobre