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13 janvier

13 janvier 2025.

Commentaire RB 58, 1-8

1 Quand quelqu’un arrive pour mener la vie religieuse, on ne le laisse pas facilement entrer.

2 Mais on suit le conseil de l’apôtre Jean : « Cherchez à savoir si l’esprit qu’ils ont vient de Dieu »
(
1 Jean 4, 1).

3 Pourtant, celui qui arrive continue à frapper à la porte. Après quatre ou cinq jours, on voit qu’il supporte avec patience le mauvais accueil et les difficultés qu’on lui fait. Et il demande toujours à entrer au monastère.

4 Alors on lui permet d’entrer, et il reste dans la maison des hôtes pendant quelques jours.

5 Ensuite, il va dans la maison des novices, là où ils méditent, mangent et dorment.

6 On leur donne un frère ancien, capable de les entraîner vers Dieu. Ce frère s’occupe d’eux avec le plus grand soin.

7 Il regarde attentivement le nouveau venu. Est-ce qu’il cherche vraiment Dieu ? Est-ce qu’il s’applique avec ardeur au Service de Dieu, à l’obéissance, aux épreuves qui rendent humble ?

8 On lui parle à l’avance de toutes les choses dures et pénibles par lesquelles on va à Dieu.

Le chapitre 58, qui est l’un des plus beaux et des plus riches de la Règle.  On y trouve le noyau de la compréhension qu’a Benoît de la vie monastique et de la façon d’y être graduellement intégré.  Le premier verset dit qu’on ne fera pas entrer facilement celui « qui venit ad conversationem », ce qu’on peut traduire par qui « qui vient pour changer de vie », ou tout simplement « qui vient pour embrasser la vie monastique ».

Non seulement, selon Benoît, il ne faut pas courir après des candidats, mais il ne faut pas leur accorder facilement l’entrée. Il s’agit de discernement. Mais quoi faut-il discerner ?

Aujourd’hui on parle facilement de « discernement des vocations ».  Je crois que cette notion aurait été incompréhensible à saint Benoît. Pour lui, il ne s’agit pas de se demander si quelqu’un « a la vocation », comme si cela pouvait être découvert avec un test sophistiqué. Il s’agit de savoir qu’est-ce qu’il veut, s’il le veut vraiment, si ce qu’il veut correspond à ce que nous avons à lui offrir dans notre communauté, et finalement s’il est capable de le vivre.

Dans le Prologue de la Règle Benoît avait imaginé Dieu passant par les carrefours et demandant : « Qui désire la vie et avoir des jours heureux ».  La Règle est écrite pour ceux qui répondent « oui » à cette question, donc pour ceux qui désirent vivre et être heureux. Il faut, dit Benoît, éprouver les esprits pour voir s’ils sont de Dieu, c’est-à-dire chercher à comprendre les véritables motifs de celui qui, tout à coup, désire entrer au monastère – motifs qui sont toujours un peu mélangés, quel que soit l’âge du candidat. Dans le contexte culturel de son temps, Benoît parle de laisser le candidat frapper plusieurs jours à la porte et de rebuffades. On trouve, de nos jours, d’autres façons de voir si le candidat est vraiment sérieux.

 L’entrée, même l’entrée initiale, est très progressive chez Benoît. Il y a là une sagesse. Lorsqu’une personne quitte une forme de vie pour en assumer une autre, il est important qu’elle puisse faire bien consciemment ce passage. Il faut passer par une sorte de vide. C’est en quelque sorte un « rite de passage ». Il y a un deuil à faire de ce qu’on laisse, et un sérieux regard, encore un peu de l’extérieur, sur ce que l’on va assumer. Si un candidat qui, par exemple, a beaucoup lu sur la vie monastique ou sur la vie spirituelle en général, entre et continue de remplir ses journées ou en tout cas tout son temps libre de ces mêmes lectures, il ne fera jamais ce « passage », cette transition qui est pourtant essentielle.  Il risque alors de n’être jamais « entré » au monastère, même s’il y vit le reste de ses jours.

Benoît prévoit que le candidat, après le discernement initial, demeurera quelques jours « dans la maison des hôtes ».  Rien n’est prévu pour ces quelques jours, sinon que le candidat les passe « dans la maison des hôtes ». Le discernement initial a déjà été fait et ce qu’on appellerait aujourd’hui la formation n’a pas encore commencé. C’est une transition durant laquelle le candidat, tout en sachant qu’il est admis à entrer dans une forme de vie, se trouve encore avec des hôtes de passage qui n’ont pas fait ce choix.  Cela lui donne le temps de se positionner, de bien voir le mode de vie qu’il laisse avant d’assumer celui qu’il a choisi.

Ce n’est qu’après ces quelques jours qu’on l’introduira à ce qu’on appelle aujourd’hui le « noviciat » et que Benoît décrit d’une façon très concrète et un peu surprenante comme le lieu où les novices « méditent, mangent et dorment ». Cela veut dire que les novices, qui célébreront l’Office divin (Opus Dei) et travailleront avec l’ensemble de la communauté, auront un lieu propre où ils vivront le reste de la journée et de la nuit sous la supervision d’un ancien.