12 mars 2025.
Commentaire Règle 1, 10-13
10 La quatrième sorte de moines est celle des gyrovagues, c’est leur nom. Ils passent toute leur vie à courir d’une région à l’autre. Pendant trois ou quatre jours, ils se font loger dans les maisons des moines, tantôt chez les uns, tantôt chez les autres.
11 Ils sont toujours sur les routes, ils ne restent jamais au même endroit. Ils sont esclaves de leurs désirs et ils ne cherchent qu’à bien manger. En tout, ils sont pires que les sarabaïtes.
12 La vie religieuse de tous ces gens-là est très mauvaise. Mieux vaut se taire que d’en parler !
13 Laissons donc ces moines de côté et, avec l’aide du Seigneur, organisons la famille très forte des cénobites.
Ce que Benoît écrit sur les gyrovagues (faux ermites) nous éclaire sur ce que sont pour lui vrais ermites, de même que ce qu’il écrivait sur les sarabaïtes (faux cénobites) éclairait sur ce que sont les vrais cénobites.
A la différence de Jérôme et de Cassien qui considéraient les « sarabaïtes » comme les pires de tous, Benoît qualifie les gyrovagues de « pires en tout que les sarabaïtes ».
Il les accuse essentiellement de passer de lieu en lieu et de profiter de leur statut monastique pour vivre aux dépens d’autrui.
Qui étaient ces moines ?
On peut dire trois choses :
- Benoît ne peut pas recenser un genre de vie monastique qu’il n’a pas sous les yeux.
- La RM les décrit en 144 versets ce qui vient appuyer la réalité historique.
- Ces moines gyrovagues ne sont pas à assimiler à ceux d’Orient qui pratiquaient la xeniteia.
Notons que Benoît, à la différence par exemple de Basile, s’il rejette les faux ermites tient en haute estime la vie érémitique, il en parle paisiblement, mais il demande de faire le contraire de ce que lui-même a vécu. Il veut éviter à d’autres de passer par les impasses par lesquelles il est lui-même passé, à Vicovaro comme à Subiaco.
Pour Benoît, seul le secours d’autrui permet de demeurer ferme dans le combat, c’est-à-dire le lien de la charité qu’il ne cesse de déployer dans la Règle. La communauté permet de ne pas être vaincu par le poids du fardeau.
Et seule, la douceur et l’humilité de la vie fraternelle préservent de la faiblesse, de l’épuisement et de la chute.
Ceci dit, s’il arrive que des frères, libérés du poids de leur fardeau et du besoin du soutien mutuel, sont attirés par la vie solitaire, Benoît le permet.
Cependant, parce que l’engagement à vie qui lie les moines entre eux ne peut pas être rompu, la vie solitaire n’est pas un prolongement naturel de la vie bénédictine. Elle doit demeurer exceptionnelle.
Elle relève seulement de l’expérience de la vie de Benoît qui rejette toujours tout esprit de système.
On peut donc dire deux choses qu’il faut tenir ensemble :
La stabilité dans le monastère jusqu’à la mort est un élément déterminant du monastère de Benoît.
Pour Benoît, les personnes sont toujours prioritaires sur les principes généraux.
6 août