27 juin 2024 / Jeudi de la 12ème Semaine du Temps Ordinaire / Années Paires / Commentaire de Esd 9, 1-9.15 – 10, 5
Les textes de l’Église orthodoxe … sont unanimes à placer le but de la vie conjugale dans les époux eux-mêmes. La théologie dogmatique du métropolite Macaire donne cette définition, la dernière en date, très claire et explicite, qui ne dit rien sur la procréation : » Le mariage est un rite sacré : les époux se promettent fidélité réciproque devant l’Église, la grâce divine leur est conférée par la bénédiction du ministre de l’Église. Elle sanctifie leur union et offre la dignité de représenter l’union spirituelle du Christ et de l’Église. «
La chute avait offusqué la lumière initiale. En parlant de l’adultère, à la place d’une » chair « , terme complexe, saint Paul dit corps un (1 Co 6, 16), ce qui rend plus incisive la solitude spirituelle, la communion avortée. Origène attire l’attention sur le premier chapitre de la Genèse, où il s’agit du mâle et de la femelle ; leur union naturelle place l’homme dans l’espèce, le soumet au commandement fait au règne animal : » multipliez, soyez féconds « . L’homme survit dans sa progéniture et se hâte d’y trouver, dans une fiévreuse fécondité, la garantie de sa survie. Seul l’Évangile fait comprendre que ce n’est pas dans l’espèce, mais en Christ, que l’homme est éternel, qu’il dépouille le vieil homme et » se renouvelle à l’image de celui qui l’a créé « . Le mariage place l’homme dans ce renouvellement. Le récit de l’institution du mariage se trouve dans le deuxième chapitre de la Genèse et parle de la » seule chair » sans aucune mention de la procréation. La création de la femme est une réplique à la parole » il n’est pas bon que l’homme soit seul « . La communion conjugale est constitutive de la personne, car c’est » homme-femme » qui est l’image de Dieu. Tous les passages du Nouveau Testament traitant du mariage suivent le même ordre et ne parlent point de la fécondité (Mt 19 ; Mc 10 ; Ep. 5). L’avènement de l’homme achève la création graduelle du monde. L’homme l’humanise, lui donne sa signification humaine et spirituelle. C’est en l’homme que la différenciation sexuelle trouve son sens et sa valeur propre, indépendamment de l’espèce.
L’économie de la Loi ordonnait la procréation pour perpétuer la race et accroître le peuple élu, afin d’atteindre la naissance du Messie. Or, dans l’économie de la grâce, la naissance des élus vient de la prédication de la foi. La côte d’où la femme était tirée n’a plus ce rôle utilitaire que lui donne la conception sociologique. Les Arabes d’aujourd’hui disent : » Il est ma côte « , ce qui veut dire » compagnon inséparable « .
Saint Jean Chrysostome déclare encore au IVe siècle : » Il y a deux raisons pour lesquelles le mariage a été institué : pour amener l’homme à se contenter d’une seule femme, et pour donner des enfants, mais c’est la première qui est la principale… Quant à la procréation, le mariage ne l’entraîne pas absolument… la preuve en est dans les nombreux mariages qui ne peuvent avoir d’enfants. C’est pourquoi la première raison du mariage, c’est de régler la vie sexuelle, maintenant surtout que le genre humain a rempli toute la terre « .
Sacrement de l’amour : Le mystère conjugal à la lumière de la tradition orthodoxe, DDB, 1980.