8 juin 2024.
Quand l’âme ne met pas d’obstacle par le péché au rayonnement de Dieu en elle, il s’établit entre elle et lui un contact indéfinissable d’amour. Il se fait présent à elle, il réside en elle, comme dans son temple, il y demeure comme chez lui. Et, en y demeurant, il la transforme, la pénètre de sa propre lumière, lui communique quelque chose de sa propre beauté. Si nous pouvions voir une âme en état de grâce, nous y verrions Dieu, et nous la verrions elle-même, sous le rayonnement divin, belle de la beauté de Dieu, pure de sa pureté. Plus est intime ce contact entre l’âme et Dieu et plus pleine la communication de la grâce divine, plus l’âme est comme divinisée et laisse transparaître Dieu dans ce reflet créé de lui-même. De ce côté positif, la pureté de l’âme peut croître indéfiniment, puisque l’union entre Dieu et elle, le rayonnement de Dieu en elle, peut augmenter sans fin.
Que l’on juge d’après cela de la pureté de Marie et de la beauté de son âme. Dieu s’est donné à elle, dès le premier moment de son existence, plus qu’il ne s’est jamais donné à aucune créature, soit humaine soit angélique. Rien en elle ne s’opposa jamais à cette effusion et à ce rayonnement de Dieu. Au contraire, la Vierge se dilatait à chaque instant sous l’influence de cette bienheureuse chaleur et de cette lumière bienfaisante ; aussi la communication que Dieu lui faisait de lui-même, son union avec elle, allait toujours croissant dans des proportions qui déconcertent notre imagination. Il la transformait de plus en plus en lui-même et la rendait de plus en plus la pure image et le miroir sans tache de sa propre beauté.
Et ces accroissements durèrent sans interruption jusqu’à la mort de Marie, jusqu’au moment où son âme, dégagée des liens du corps, apparut éblouissante au milieu des bienheureux. Sans rien perdre de son propre éclat, elle fondit, pour ainsi dire, sa propre lumière dans celle de son Fils et dans celle de la Divinité. On comprend que l’Église ne cesse de l’appeler toute pure et toute belle ; on comprend qu’elle reste comme en extase devant cette image si parfaite de la beauté divine et de la pureté infinie.
Parler ainsi de l’âme toute pure de Marie, c’est parler en même temps de son Cœur très pur. Dans cet ordre d’idées, le cœur et l’âme ne font qu’un, comme ne font qu’un le symbole et ce qu’il symbolise. Le cœur s’entend ici de l’intérieur de Marie, c’est-à-dire de son âme. Et cependant il y a place pour la considération du Cœur lui-même, en entendant par ce mot le symbole vivant de sa vie intime et morale, de sa vie affective. Car Marie n’était pas passive sous l’action divine, comme le miroir sous l’action de la lumière, elle ne se contentait pas non plus de la recevoir vitalement par une réaction spontanée, comme la plante reçoit la chaleur du soleil, ou comme l’œil reçoit l’image visuelle. Mais elle s’offrait tout entière au Dieu qui se donnait à elle ; elle allait, avec toutes les énergies qu’elle tenait de la grâce déjà reçue, au-devant de celui qui venait à elle, et son Cœur se fondait délicieusement au contact purifiant et transformant de la Divinité ; il se plongeait en quelque sorte dans cet immense océan d’amour et de pureté, où il se sentait à la fois pleinement rempli, divinement dilaté, infiniment débordé.
Le Saint-Cœur de Marie, p. 26-29.