9 mars 2025.
1er Dimanche de Carême
Année C
Lc 4, 1-13
Cette page d’Evangile, je vous propose de l’entendre comme une invitation à ne pas avoir peur de la mort, peur de notre mort… pour devenir des hommes et des femmes libres.
Il me semble que ce thème est central dans le récit des tentations, mais aussi central dans le temps du Carême. Il existe un verset de la Lettre aux Hébreux qui dit très bien cela :
Le Christ a partagé notre condition humaine « afin de réduire à l’impuissance, par sa mort, celui qui détenait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable, et de délivrer ceux qui, par crainte de la mort, passaient toute leur vie dans une situation d’esclave » (Hb. 2, 14-15).
L’être humain, qui est mortel, a une peur naturelle de la mort. S’il se laisse dominer par cette peur, il s’efforce de vivre pour toujours, soit physiquement en satisfaisant tous ses désirs, soit socialement par l’exercice du pouvoir engendrant des empires – petits ou grands – soit mentalement dans le nom ou la réputation qu’il espère laisser derrière lui. Et c’est ainsi que, dit l’auteur de la Lettre aux Hébreux, il passe toute sa vie esclave, par peur de la mort.
Ce sont les trois tentations auxquelles a été soumis Jésus et les tentations que décrit ici l’Évangéliste sont celles que Jésus rencontrera tout au long de sa vie publique de la part de ses ennemis.
Tout au long de son ministère, Jésus, venu pour rétablir la fraternité entre les hommes, (fraternité brisée par le péché) et pour nourrir de pain et d’amour les pauvres, les malheureux et les affamés, refusera toujours d’utiliser Dieu, ou sa nature divine, à son profit.
Ici, la tentation centrale, qui, en fait, contient les deux autres, est celle du pouvoir : le démon montre à Jésus « tous les royaumes de la terre », lesquels lui appartiennent… Dans le texte grec, il s’agit de tous les royaumes de l’oikoumenè, c’est-à-dire du monde habité ou plus précisément de toutes les régions alors sous la domination de l’empire romain, qui est un empire « païen ».
L’appel de l’Évangile en ce début de Carême est donc un appel à nous libérer de l’esclavage dans lequel nous enchaîne la peur de la mort, un appel à accepter notre statut d’être mortel, dont nous faisons l’expérience tout au long de notre vie.
Chacun de nous, selon sa vocation propre, doit découvrir au jour le jour comment vaincre cette peur de la mort.
Reprenons les trois tentations :
1ère tentation : « Si tu es le Fils de Dieu, dis à cette pierre de devenir du pain ».
Pour le diable, être Fils de Dieu, c’est dominer les choses, dominer par la parole…
Jésus lui répond : « L’homme ne vivra pas de pain seulement ».
Pour lutter avec la peur de la mort, il faut apprendre à vivre avec le manque. Nous avons besoin de manger pour vivre, oui, Jésus ne le nie pas, mais « Pas seulement de pain » … Pas seulement ! Il n’y a pas que çà dans la vie ! Ne pas se focaliser sur le matériel.
2nde tentation : « C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, à lui seul tu rendras un culte ».
Le diable est appelé « prince de ce monde », parce qu’il aime le clinquant, le brillant du pouvoir et des honneurs. A cette seconde tentation, Jésus répond en disant au contraire : « DIEU SEULEMENT ! », « c’est seulement le Seigneur ton Dieu que tu adoreras ! ». Jésus ne veut pas le pouvoir, il choisit l’image d’un Messie sans gloire et serviteur qui tient sa gloire du Père.
3ème tentation : Jésus désire dans sa condition humaine s’attacher à Dieu seul, alors le diable conduit Jésus au temple, au lieu où l’on prie Dieu pour qu’il fasse preuve de confiance en Dieu en sautant du haut du temple ; le diable utilise ici l’arme de Jésus, la Parole de Dieu.
Il cite le Ps 90, il veut que Jésus fasse resplendir sa qualité de Messie, or Jésus ne veut pas s’imposer aux hommes et moins encore s’imposer à Dieu. Il n’utilise pas l’Écriture comme une assurance, il se laisse au contraire conduire par Dieu à travers l’Écriture.
Voilà ce que nous enseigne le récit des tentations, nous vaincrons la peur de la mort et l’esclavage, du matérialisme, du goût du pouvoir, du désir ambigu d’être toujours reconnu et estimé par les autres :
En l’écoutant, ce qui suppose vivre avec le manque et ne jamais être rassasié.
En le suivant, ce qui suppose ne pas chercher sa propre gloire.
En patientant, ce qui suppose de ne pas utiliser Dieu et sa Parole.
12 décembre