Skip to content Skip to sidebar Skip to footer

1 décembre 2024.

1er dimanche de l’Avent

Année C

Lc 21, 25-28.34-36

25 Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées et désemparées par le fracas de la mer et des flots. 26 Les hommes mourront de peur dans l’attente de ce qui doit arriver au monde, car les puissances des cieux seront ébranlées.

27 Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans une nuée, avec puissance et grande gloire.
28 Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche. »

34 Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s’alourdisse dans les beuveries, l’ivresse et les soucis de la vie, et que ce jour-là ne tombe sur vous à l’improviste
35 comme un filet ; il s’abattra, en effet, sur tous les habitants de la terre entière.

36 Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme. »

Aujourd’hui s’ouvre le temps de l’Avent, c’est le temps de l’attente, c’est le temps du désir, c’est le temps de l’espérance. Le chrétien est l’homme qui espère. Écoutons le poète Charles Péguy :

La foi que j’aime le mieux dit Dieu, c’est l’espérance (…) L’espérance, dit Dieu, voilà ce qui m’étonne. Moi-même. Çà c’est étonnant. Que ces pauvres enfants voient comme tout çà se passe et qu’ils croient que demain çà ira mieux. Qu’ils voient comme çà se passe aujourd’hui et qu’ils croient que çà ira mieux demain matin. Çà c’est étonnant et c’est bien la plus grande merveille de notre grâce. Et j’en suis étonné moi-même. Et il faut que ma grâce soit en effet d’une force incroyable. Une flamme tremblotante a traversé l’épaisseur des temps. Une flamme anxieuse a traversé l’épaisseur des nuits. Depuis cette première fois que ma grâce a coulé pour la création du monde. Depuis toujours que ma grâce coule pour la conservation du monde. Depuis cette fois que le sang de mon fils a coulé pour le salut du monde. Une flamme impossible à atteindre, impossible à éteindre au souffle de la mort.

Ce qui m’étonne, dit Dieu, c’est l’espérance. Et je n’en reviens pas. Cette petite espérance qui n’a l’air de rien du tout. Cette petite fille espérance. Immortelle (…) Cette petite fille pourtant qui traversera les mondes. Cette petite fille de rien du tout. Elle seule portant les autres, qui traversera les mondes révolus.

Les premiers versets du texte évangélique nous parlent du retentissement dans le cosmos, dans la nature, de ce qui advient dans nos histoires humaines…nous le savons bien, lorsque nos vies sont traversées par le péché, par la trahison, par l’injustice, par la persécution, l’univers entier nous apparaît défavorable…  Nos frères, nos sœurs, notre corps, nos activités, la terre qui nous porte, tout nous paraît soudain hostile.

Or, Jésus nous invite aujourd’hui comme hier à reconnaître sa venue non pas à partir de signes qui seraient extérieurs à notre vie, mais à partir de ce que nous vivons, aussi cette espérance qui fait relever la tête s’appuie forcément sur une expérience personnelle… notre désir du Christ, l’attente en nous de son retour se trouve saisie dans les blessures de nos histoires humaines et dans leur retentissement extérieur.

L’histoire des hommes n’est pas si facile, elle est bien souvent traversée par la souffrance…par le tourment : aujourd’hui encore des nations qui sont dans l’angoisse nous en connaissons, des catastrophes écologiques aussi, deshommes qui défaillent de frayeur parce que tout s’écroule dans leur vie, nous en connaissons. Des signes comme ceux que nous rapporte l’Évangile, il y en a eu à toutes les époques.

Quand cela commencera d’arriver, redressez-vous et relevez la tête, parce que votre délivrance est proche. Habituellement pour Luc, les signes du Royaume, ce sont les aveugles qui voient et les pauvres qui sont évangélisés, ce ne sont pas les malheurs… et pourtant ce matin, ce sont les catastrophes que Jésus nous invite à accueillir comme des signes qui doivent nous provoquent à nous redresser et à relever la tête et qui annoncent notre délivrance.

Il y a là un paradoxe : lorsque la puissance du mal se déchaîne, nous sommes invités à discerner la puissance du Christ ; Un peu comme si le Christ était celui qui apaise en nous toute tension et qui rétablit l’harmonie. Les réalités humaines parfois douloureuses que nous avons à vivre deviennent ce par quoi Jésus sauve nos histoires.

Face à l’adversité et aux épreuves, deux attitudes sont possibles :

  • La première attitude consiste à se laisser écraser par le poids d’un malheur qui pèse trop lourd, à cesser d’espérer et à sombrer dans des réflexes de fuite, à des tentations de bonheur éphémère. Le texte grec indique que ces hommes sont assis, ils sont en quelque sorte enfermés, prisonniers dans leur malheur.
  • La seconde attitude consiste à demeurer éveillé, à se tenir debout, pour fixer son attention sur ce qui ne passe pas.

Au début de l’Évangile de Luc, Zacharie rempli de l’Esprit Saint, c’est-à-dire prophète, annonce ce que sera la mission de son fils, Jean-Baptiste : Toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-Haut car tu marcheras devant le Seigneur, pour lui préparer les voies. Pour donner à son peuple la connaissance du salut par la rémission de ses péchés, grâce aux sentiments de miséricorde de notre Dieu, dans lesquels nous a visités l’Astre d’en haut. Faire découvrir aux hommes qui désespèrent le chemin du salut, cela passe par la découverte de la miséricorde de Dieu et cette découverte doit être contagieuse ; le texte continue : pour illuminer ceux qui sont assis dans les ténèbres et à l’ombre de la mort pour conduire nos pas au chemin de la paix. Nous avons ici en grec le même verbe que dans l’Évangile de ce jour : Être assis…kaqhsmai. Ce verbe dans la Bible est souvent accompagné d’une image, celle d’être assis dans les ténèbres : Le peuple qui était assis dans les ténèbres a vu une grande lumière, sur les habitants du sombre pays une lumière a resplendi dit Isaïe (…) Certains étaient assis dans les ténèbres et  à l’ombre de la mort, prisonniers de la misère et des fers dit le psalmiste ; un autre passage d’Isaïe peut être particulièrement parlant pour nous en ce premier jour de l’Avent : Moi le Seigneur, je t’ai appelé dans la justice, je t’ai pris par la main et je t’ai formé, je t’ai désigné comme alliance du peuple et lumière des nations, pour ouvrir les yeux des aveugles, pour faire sortir de prison les captifs et du cachot ceux qui sont assis dans les ténèbres (Is 42,7).

            La vie est trop souvent et pour beaucoup trop de gens comme un filet, comme un piège qui se referme sur eux et qui les étouffent… Le Christ est celui qui est venu rejoindre ces hommes et ces femmes qui n’en peuvent plus… il est venu pour les mettre debout. Un jour, et ce fut notre Jour, chacun de nous a fait cette expérience d’avoir été délivré ; en ce début de l’Avent, le Christ nous confie cette mission, d’être comme Jean-Baptiste, auprès de nos frères, le Consolateur. La source de la mission de l’Église, elle est contenue dans l’espérance des croyants, c’est elle qui est contagieuse et c’est par elle que le Christ peut aujourd’hui encore relever la tête de ceux qui n’en peuvent plus.

Cette espérance contre toute espérance, nous ne la trouverons pas en nous-mêmes mais dans la prière au Christ, car cette espérance est le fruit de sa grâce.

1 décembre 2024