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Vendredi de la 10ème Semaine du Temps Ordinaire (Mt 5, 27-32)

14 juin 2024.

Les paroles de Jésus, s’arracher son œil droit ou sa main droite (le côté symbolique du bon) doivent, bien sûr, être pris au sens métaphorique ; c’est là accepter un renoncement nécessaire pour vivre dans la justice de Dieu.

Il faut perdre un peu de soi, se perdre et renoncer à la tentation du pouvoir et de la convoitise. Là encore après l’évocation du tribunal, Matthieu exprime la perdition de l’homme en termes de géhenne, c’est-à-dire de ce lieu de mort, manifestant la rupture d’avec la volonté de Dieu. 

Le commandement de Moïse contre l’adultère n’est pas remis en question. Il n’est pas non plus amplifié. Mais, une fois encore, il sert d’appui à un enseignement plus fondamental sur le rapport de chacun aux biens, aux personnes et au pouvoir. Car l’exemple de Jésus dépasse de loin le seul cadre nuptial.  

Que ce soit pour le meurtre ou l’adultère, l’interprétation de Jésus donne aux commandements de Moïse une visée plus essentielle qu’une simple jurisprudence. Chaque commandement exprime ainsi toute La Loi.

Quant à la répudiation, elle constituait un acte autorisant le mari à renvoyer son épouse à cause de son infécondité, de son mauvais caractère ou parce qu’elle est mauvaise cuisinière ou trop âgée… Les motifs de répudiation étaient d’ailleurs l’objet des débats pharisiens. La Loi reste effectivement vague. 

Dt 24, 1 Soit un homme qui a pris une femme et consommé son mariage ; mais cette femme n’a pas trouvé grâce à ses yeux, et il a découvert une tare à lui imputer ; il a donc rédigé pour elle un acte de répudiation et le lui a remis, puis il l’a renvoyée de chez lui (…).

Matthieu, respectueux de la Loi, autorise la répudiation – contrairement à Lc 16,18 – pour cause d’union illégitime, littéralement de ‘porneia’ πορνεία. Un terme qui peut renvoyer aux unions consanguines ou à l’inconduite sexuelle comme à la prostitution. Mais L’évangéliste n’en reste pas à cette seule acception.

Le cas qui est ici décrit en termes d’adultère est tout à l’inverse du précédent (v.27) qui qualifiait d’adultère le fait de ramener à soi (de séduire) la femme de son prochain, comme la convoitise d’un bien. En ce discours, l’adultère est marqué par le fait d’abandonner sa propre épouse l’obligeant – pour des raisons de survie – à épouser un autre homme afin de pouvoir à sa sécurité et sa subsistance. Et si Jésus condamne le nouvel époux, c’est qu’en en acceptant la femme répudiée, il accepte le principe de la répudiation arbitraire. 

Ce que pointe ici Jésus ce n’est pas tant la question de la répudiation sur laquelle l’évangéliste reviendra (Mt 19,5-8) mais cette terrible alternative qui réduit l’interprétation de la Loi de Moïse en termes d’autorisation ou d’interdit. 

Car ce qui autorisé pour soi (répudier) n’est pas toujours bon pour l’autre (être répudiée). Ainsi l’acte légal de répudiation entraîne le risque grand d’adultère condamné plus haut. Jésus ne conçoit pas la Loi comme une liste de commandements à valider, mais comme un cadre nécessitant un discernement quant au bien, au bonheur d’autrui et à la volonté de Dieu.