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11 août 2024.

19ème dimanche du Temps Ordinaire – Année B (Jn 6, 41-51)

Dans l’Évangile de ce jour, des hommes s’opposent à la Parole de Jésus : « je suis le pain descendu du ciel » car ils connaissent sa famille : Jésus est le fils de gens qu’ils connaissent.

Jésus leur répond : « Ne murmurez pas entre vous » (ne récriminez pas entre vous) ; c’est-à-dire réfléchissez autrement sur moi, entrez dans une autre manière de voir et de penser.

La connaissance de Jésus, la compréhension de son mystère ne se donne pas à voir de l’extérieur, par le raisonnement et par des pensées trop humaines, elle est dit-il « un don du Père ».

À la pure réflexion théorique des hommes, Jésus oppose la prise au sérieux de l’expérience pratique du don.

Pour expliquer ce don, Jésus prend l’image du pain et il s’identifie au pain.

Parce que, pour Jésus, le pain qui se partage et qui se donne aux hommes, le pain déposé sur la table sans même y penser, le pain qui fait partie du quotidien tellement qu’on l’oublie lorsqu’il est là, mais qui fait que lorsqu’il vient à manquer, l’on ne sait plus comment faire pour manger, ce pain-là, illustre à merveille ce qu’est Dieu dans nos vies et ce qu’il est en soi.

  • Le pain est toujours là sur la table et il est le même pour tous : pour les enfants et pour les vieillards, pour ceux de la maison et pour les étrangers de passage
  • Il nous fait vivre et il nous nourrit
  • Il nous nourrit lorsque nous acceptons de le couper et de le partager
  • Il se passe au voisin, il fait l’unité de la table, l’unité des convives, l’unité de la famille humaine
  • Il ne s’impose pas à nous
  • Il ne nous impose aucune parole de gratitude

Cette expérience du pain est celle que Jésus a voulu prendre, elle s’inscrit dans sa culture, elle s’inscrit aussi dans notre expérience de la vie.

Jusque-là, l’homme croyant acceptait que, du ciel, Dieu donne à l’homme la nourriture, que les fruits de la terre soient le fait de la bonté du ciel ; aujourd’hui, l’homme découvre que Dieu est bien plus qu’un simple dispensateur de biens, car il y a dans ce pain bien plus que la manne du désert. Ce pain, c’est l’amour incarné, par ce pain silencieux, nous apprenons que l’amour de Dieu est humble ; par ce pain partagé, rompu, nous apprenons que cet amour est un amour qui se donne et qui se partage, un amour où Dieu se donne totalement et même disparaît en se donnant, s’efface et cet effacement de Dieu, c’est la personnalité même de Dieu, c’est l’amour qui fait vivre sans s’imposer à nous.

Parce que ce pain du ciel, lien vivant entre le ciel et la terre, est rompu sur la terre, il devient aussi à présent le lien vivant entre la terre et le ciel. Tout d’abord parce que celui qui le reçoit du Christ, devient en quelque sorte comme celui qu’il reçoit, du bon pain pour les autres, car la vie du Christ ne se perd pas, elle se donne et se partage pour que l’homme devienne à son tour un pain rompu, livre, partagé.

Parce que tout cela est sérieux, une question demeure cependant, la place de la souffrance, la place du manque, la place de la faim et de la misère ! Si Dieu est pain, pourquoi tant d’hommes ont-ils faim et meurent-ils de faim, eux qui sont parfois les disciples de Celui qui s’est proclamé être le pain de la vie ?

Trois choses sont à balbutier ici :

  1. Si, pour nourrir l’humanité, Dieu nous apporte un pain et vient à nous par ce pain qu’il apporte, ce pain a été tellement partagé et coupé en petits morceaux qu’il ne nourrit pas l’estomac mais, depuis deux mille ans, il met ensemble des hommes de toute race, langue, peuples et nations. C’est un pain qui instaure la fraternité par le partage, et la reconnaissance de cette fraternité est une vraie nourriture pour l’humanité.

     Dieu, notre Père, a voulu que le bonheur des hommes, l’instauration de la fraternité universelle, passe par nos mains ouvertes, nos cœurs pris de compassion, nos intelligences occupées à la seule tâche de l’amour. Une telle communauté de disciples si elle prenait au sérieux la communion au Corps et au Sang du Christ pourrait transformer le monde et supprimer la misère de la terre.

  • L’autre réponse au malheur, à la souffrance et à la faim dans le monde est que la Vie que Dieu nous donne dans l’eucharistie est une vie humble et silencieuse. Lorsque le Christ s’approche de l’homme qui souffre, il lui donne bien plus que de la nourriture, il n’efface pas le malheur ou la souffrance, mais il apporte sa présence éternelle d’amour, celle qui donne du sens et qui ouvre toujours un avenir.
  • Et enfin, ce pain qu’il donne et qu’il a voulu devenir est toujours un pain partagé, c’est-à-dire un pain écartelé comme il l’a été sur la croix. Le Christ vient dire sa solidarité à l’homme qui peine et qui n’en peut plus, avec un morceau de pain partagé. À l’homme qui est exclu, qui n’est plus rien aux yeux des hommes, Dieu déclare son identité, celle de l’amour absolu passé par le feu de la souffrance, de l’abandon et même de la mort.

À l’homme qui est exclu, Dieu en Jésus-Christ, ne fait pas un discours, il vient, silencieux, à ses côtés. Lui, le ressuscité ; il se donne à voir sous un morceau de pain rompu et partagé pour que soit partagé l’amour et sa victoire.

Dans l’Eucharistie, dans ce morceau de pain dans nos mains, nous découvrons Dieu non seulement tel qu’il est pour nous, mais aussi tel qu’il est en lui-même. Recevons-le comme tel et adorons-le.