Dimanche 28 octobre 2018, 30 ème dimanche du Temps ordinaire B, Textes : Jr 31,7-9 ; Ps 125 ; He 5,1-6 ; Mc 10, 46-52.

                        L’Aveugle  de Jéricho : modèle de foi, d’espérance et de charité

Introduction:

Les textes de la liturgie de ce jour nous invitent à la joie. La joie, c’est le sentiment qui nous anime quand nos attentes sont comblées. La joie, c’est ce qui nous habite quand nous faisons une expérience heureuse.  La joie, c’est d’abord et avant tout un don de Dieu. 

Les motifs de cette joie sont : l’annonce du retour de l’Exil ; la présence de notre unique et grand prêtre le Christ, Sauveur du monde ;  enfin la guérison de l’aveugle de Jéricho. 

La joie nous est toujours proposée mais nous ne savons pas souvent l’accueillir ou nous nous disposons mal à l’accueillir. Demandons pardon au Seigneur.

Homélie :

Dans la première lecture de ce jour, le Prophète Jérémie annonce le  retour joyeux  de l’Exil. C’est vraiment une bonne nouvelle. Les Prophètes savent avertir pour appeler à la conversion. Ils savent aussi consoler pour annoncer l’espérance dans l’épreuve. Après 50 ans d’Exil à Babylone (587-537), les survivants vont regagner leur terre. Partis dans la tristesse sous les pressions et les violences, ils reviendront dans la joie. Partis sous la domination du babylonien Nabuchodonosor, ils reviendront sous la bienveillance du Perse Cyrus. 

Ce retour de l’Exil est vécu comme une résurrection : on revient de la mort. Dieu seul est capable de redonner vie à ce qui semblait mort. Dans le lot du retour, il y aura des personnes âgées, des malades, des boiteux, des aveugles, etc. Ils reviennent sur leur terre, contents d’y revenir mourir. Dieu seul est capable de ce renversement de situation. Dans son amour qu’aucune infidélité humaine n’a réussi à diminuer, Dieu rassemblera son Peuple. C’est ici une leçon d’espérance.  

Dans l’Evangile de ce jour, il s’agit de la guérison de l’aveugle de Jéricho. Cet épisode est commun aux trois synoptiques, qui le placent dans le même contexte, c’est-à-dire la marche vers Jérusalem. Jésus passe par Jéricho pour aller à Jérusalem où il ne sera pas reconnu par ceux qui voient clair, qui ‘’ savent’’.

La guérison de l’aveugle,  c’est un autre retour d’Exil, c’est un autre changement de situation qui s’opère : le passage de la cécité à la guérison, le passage de l’obscurité à la lumière, le passage de l’isolement à la communion, le  passage de l’humiliation à l’épanouissement.

Le deuxième personnage important de ce récit après Jésus, est  Bartimée. Ce fils de Timée est un aveugle qui mendiait au bord de la route. Sa cécité l’a plongé dans la dépendance totale vis-à-vis des autres. Cette cécité l’éloigne de la réalité. Il entend les choses mais ne les voit pas. Il est assis au bord de la route et entend tout ce qui est dit au sujet de Jésus, des  miracles qu’il accomplit, etc. Il se laisse habiter par ce désir de rencontrer cet Homme dont il entend parler. Il sait même son identité : Jésus est de la lignée de David de par Joseph, son Père adoptif. Les passants du chemin de l’aveugle lui font l’aumône, lui donnent des piécettes. 

Jésus quant à lui, donne plus et gratuitement. Ce que les autres donnent est limité. Ce que Jésus donne est surabondant. Jésus met debout. La dépendance vis-à-vis des autres maintient dans la position assise. 

La Lettre aux Hébreuxprésente Jésus comme le grand Prêtre, solidaire des hommes. C’est Lui que Dieu a envoyé pour libérer les hommes de toutes leurs situations difficiles. C’est lui qui nous fait revenir de notre Exil. Jésus donne la vie, il la donne en abondance.

Cet aveugle de Jéricho désire plus qu’une  guérison physique. Il désire une relation avec le Sauveur. L’aveuglement fait de lui un exilé de ce monde. Il appelle au secours : « fils de David, prends pitié de moi ! », « Fils de David, fais-moi sortir de cet enfer », « Fils de David, fais- moi sortir de cette obscurité, Toi le Messie, Toi la Lumière du monde ! », « Fils de David, Toi le médecin par excellence, guéris-moi », « Fils de David, Toi la source de tout don, vient combler mon manque ! » 

Jésus entend le cri du malheureux. Jésus entend toujours nos cris lancés vers lui. Il ne reste pas indifférent à nos situations. Il  nous montre sa solidarité et sa compassion. Mais il tient toujours compte de notre liberté. Il s’arrête et dit : « appelez-le ! ». « Appelez-le ! », l’expression est une invitation à l’engagement. Une invitation à exprimer clairement son désir. 

L’aveugle était rabroué par beaucoup de gens, nous dit le texte. Quand à Jésus, il ne l’a pas rabroué. Jésus s’arrête, la situation de l’aveugle l’arrête. Jésus s’arrête sur nos situations pour nous aider à nous en sortir.   La réaction de Jésus amène les foules à changer de regard.  Ceux qui rabrouaient, ont changé d’attitude. Du moins, certains  se mettaient désormais  à encourager l’aveugle : « Confiance, lève-toi ; il t’appelle. » 

 « L’aveugle jetason manteau, bonditet courutvers Jésus ». Trois verbes d’action : jeter, bondir, courir. Il pose tous ces gestes sans concours, sans guide. Il s’oriente tout entier  vers Jésus. En l’interpellant comme « Fils de David », l’aveugle reconnaît en Jésus, le Messie. Lui qui ne voyait pas reconnaît qui est Jésus ? Jésus est venu sauver mais il ne sauve pas sans nous. L’aveugle montre sa coopération à la guérison. Il est entièrement ouvert à la grâce qui restaure et réhabilite. Dieu donne la grâce en son Fils et par son Fils.  Il dispose à l’accueil de ce qu’il donne mais il faut consentir à ce don.  Il faut conquérir comme l’aveugle en se débarrassant de tout ce qui nous fait obstacle. « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » « Quel est ton désir profond ? » « Quelles sont tes attentes ? » Jésus veut voir si ce désir est profond. Un désir qui fera  de l’aveugle un disciple : « Rabbouni, que je retrouve la vue ! » 

Seigneur, aide-moi à retrouver ce que j’ai perdu par ma faute. Aide-moi à revenir vers toi. L’aveugle ne veut pas s’arrêter à la guérison mais veut marcher à la suite de Jésus. L’aveugle fait l’expérience du bénéfice de la foi : « Va, ta foi t’a sauvé ». Aussitôt guérit, l’homme se mit à suivre Jésus. Au don gratuit de Jésus, Bartimée veut se donner tout entier. Jésus ne refuse jamais celui qui veut venir à lui. L’aveugle de Jéricho est un modèle de foi, la foi parfaite. Cette foi inspire la prière confiante et persévérante qui lui obtient de devenir lucide, et cette foi lui inspire la fidélité avec laquelle il suit Jésus. On peut dire de lui aussi, le modèle de l’espérance et de la charité : à l’amour du Christ, il répond par l’amour.

Seigneur, viens nous guérir ! Viens nous sortir de toutes les situations difficiles que nous vivons et que nous ne comprenons pas ! Tu es le Maître de la Vie, celui qui te suit ne marche pas dans la nuit. Tu es Lumière.       

 Frère Aimé TANO